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Texte complet : Liberté de réunion (PDF)
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  • 8. Les rassemblements concernant des personnages et intérêts publics bénéficient d’une protection particulière

    Le droit de réunion pacifique offre, pour reprendre les termes utilisés par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, des « possibilités inestimables » d’exprimer des opinions politiques, de s’adonner à des activités littéraires et d’autres occupations culturelles, économiques et sociales et de pratiquer sa religion.[1]

    Les tribunaux et les mécanismes internationaux soulignent qu’il existe un risque particulier de restrictions illégitimes lorsque le droit de réunion est utilisé pour exprimer des points de vue critiques sur les autorités ou d’autres intérêts puissants. Les restrictions dans ces domaines doivent être surveillées de près.

    Le Comité des droits de l’homme a déclaré ce qui suit en ce qui concerne le PIDCP :

    [L]e Pacte accorde une importance particulière à l’expression sans entraves dans le cadre des débats publics concernant des personnalités du domaine public et politique qui sont tenus dans une société démocratique.[2]

    La ComIDH et la Cour interaméricaine des droits de l’homme ont, quant à elles,

    affirmé de façon constante la nécessité que le test afférent aux limitations soit appliqué de manière plus stricte lorsqu’il est question d’expressions concernant l’État, les affaires d’intérêt public, les fonctionnaires publics dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions ou les candidats à une charge publique, ou encore des particuliers qui participent volontairement à des affaires publiques, ainsi qu’à des discours et à des débats politiques.[3]

    De même, la CEDH a souligné, dans l’affaire Sergey Kuznetsov c. Russie, que les restrictions imposées aux rassemblements concernant les « discours politiques ou des questions sérieuses d’intérêt général » portaient atteinte à la démocratie et requéraient des motifs solides :

    [L]es mesures entravant la liberté de réunion et d’expression en dehors des cas d’incitation à la violence ou de rejet des principes démocratiques – aussi choquants et inacceptables que peuvent sembler certains points de vue ou termes utilisés aux yeux des autorités – desservent la démocratie, voire, souvent, la mettent en péril. Dans une société démocratique fondée sur l’État de droit, les idées qui contestent l’ordre établi doivent se voir offrir une possibilité convenable de s’exprimer à travers l’exercice du droit de réunion, ainsi que par d’autres moyens légaux (…).

    [L]a Cour note que le piquet avait pour objet d’attirer l’attention publique sur le prétendu dysfonctionnement du système judiciaire dans la région de Sverdlovsk. Cette question sérieuse relevait, indéniablement, du débat politique concernant une affaire d’intérêt public et général. La Cour réitère, à ce propos, son approche constante consistant à exiger des motifs très solides pour justifier les restrictions imposées au débat politique ou les questions sérieuses d’intérêt général, telles que la corruption du système judiciaire (…).[4]

    Dans l’affaire Hyde Park et autres c. Moldavie (n° 5 et 6), la CEDH a encore souligné la nécessité de faire preuve de tolérance à l’égard des critiques visant les personnages publics, même si celles-ci sont exprimées en des termes durs :

    Les requérants cherchaient à protester contre le prétendu harcèlement pratiqué par le Ministère de l’intérieur. (…) Même si leurs signes et leurs chants visaient à insulter le Ministre, il s’agissait-là, clairement, d’un personnage public d’une certaine importance en Moldavie. Dans une société démocratique, il convient de faire preuve d’une plus grande tolérance vis-à-vis de ceux qui expriment des opinions critiques à l’égard de tels personnages, et cela même si lesdites opinions sont exprimées de façon non explicite ou sans retenue.[5]
    1. Conseil des droits de l’homme des Nations unies, Résolution 15/21 sur le droit de réunion pacifique et d’association, Doc. des Nations unies A/HRC/RES/15/21, 6 octobre 2010.
    2. Comité des droits de l’homme, Observation générale 34 : Article 19 (Libertés d’opinion et liberté d’expression), Doc. des Nations Unies CCPR/C/GC/34 (2011), point 34. (uniquement disponible en anglais)
    3. ComIDH, Report on the Criminalization of the Work of Human Rights Defenders, OEA/Ser.L/V/II, Doc.49/15, 31 décembre 2015, point 95. (uniquement disponible en anglais)
    4. Sergey Kuznetsov c. Russie, CEDH, arrêt du 23 octobre 2008, points 45 à 47. (uniquement disponible en anglais).
    5. Hyde Park et autres c. Moldavie (n° 5 et 6), CEDH, arrêt du 14 septembre 2010, point 43. (uniquement disponible en anglais)